Cela fait trois ans que je vis dans le même tourment. Il y a des rêves qui me rongent, que je n'arrive jamais à me rappeler ou bien comprendre. Est-ce des souvenirs qui me hantent ou bien des illusions que je me crée pour combler ce vide depuis le jour où j'ai supposément perdu la mémoire ? Je suis quelqu'un qui, automatiquement, veut boucher les trous pour que tout soit logique. J'ai bien beau essayer de demander aux gens des réponses, mais j'ai toujours l'impression que la plupart me mentent. C'est dur de savoir si je mérite la vérité.
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Rengu Kokuren. Elle semblait si loin à la fois si proche. Elle était comme une ombre bienveillante, discrète, et distante. Froide, peut-être, mais présente. Belle, élégante, furtive...féroce, oppressante, puissante. Mes yeux n'étaient que fascinés par sa beauté, brillante d'amour et de tristesse dans leurs prunelles. À chaque fois que je la voyais, je ne pouvais que ressentir de la solitude. Je voulais qu'elle me regarde et qu'elle me prenne dans ses bras. Elle était pour moi une merveille. Elle était ma Mère.
À mes yeux, elle était mon univers.
Pendant longtemps, j'avais essayé d'acquérir son affection par multiples moyens. Quitte à me faire du mal. Elle venait à de rares moments, quand j'étais malade, pour me tenir compagnie pour quelques instants. Moi, ce n'était pas assez. Je voulais qu'elle reste avec moi un peu plus longtemps. Avait-elle peur de moi ? Était-elle dégoûtée de ma présence ? Je ne pouvais pas le savoir. On me disait que non. On me disait que ma mère n'était pas comme ça.
Comment je pouvais le savoir ?
Durant les premières années de ma vie, cette femme était quelque chose que je voulais attirer. En grandissant, je comprenais que ma mère ne pouvait pas toujours être là. J'essayais quand même d'être un bon garçon. Je faisais des efforts pour apprendre plein de choses, même les plus complexes. On me disait que j'étais très intelligent, alors j'y croyais fortement. Je suivais le régime éducatif que ma matriarche m'offrait sans dire un seul mot. Même que j'avais été plus loin, en lui demandant si je pouvais étudier la médecine, vers l'âge de mes 15 ans. J'avais cette passion d'apprendre à un niveau qui, pour beaucoup, était maladif.
Tout ce que je voulais c'est qu'elle me regarde et qu'elle me dise qu'elle m'aimait. Je voulais ma mère à moi tout seul. Ma soeur, elle ? C'est une tout autre histoire. Moi et ma sœur, nous étions complices. Elle était sûrement plus douce, moins vorace que moi. Ma soeur était mon complémentaire, comme une partie de moi. Nous étions, en quelques sortes, les deux côtés de la médaille. Par contre, moi, j'avais ''hérité d'être égoïste''. Même si je ne le montrais pas toujours, je savais que je ne pensais qu'à moi. Ma soeur n'était pas ma mère. Ma soeur était pour moi un autre monde à part. Pour moi, elle était qu'une continuité de ma personne. Ma mère, elle, était un joyau que je devais garder pour moi.
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Nagato Kakon.Un homme que je respectais et que pendant longtemps, j'offrais mon aide. Même si la folie avait pris possession de lui, c'était mon père. Je ne l'abandonnais pas. J'essayais de le rendre fier même si parfois, je visais à plus plaire à ma mère. Peut-être que le fait que ma soeur était sûrement sa favorite, je me sentais plus ou moins proche avec sa personne. Je sentais moins le besoin de me forcer pour lui. Nous avions eu une bonne relation, sans dépasser les bornes.
Par contre, c'est lui qui m'a transformé en taciturne. C'est lui qui m'a appris à ne jamais faire confiance à personne. Je ne crois pas qu'il pensait à mal faire, mais ...il avait compris que j'avais une personnalité sensible. En tant que père, je crois qu'il avait essayé de me créer une barrière pour ne pas que je sois faible.
On me disait que je lui ressemblais. J'avais sa prestance et son sourire. Ah bon ? Je n'étais pas d'accord. Pour moi, j'étais une version étrange de ma mère. Certes, mon père était un fort bel homme avec un charisme époustouflant, mais pour moi, uniquement mes ailes étaient de lui.
Entre mes parents, vous pouvez remarquer que ma mère était bien plus importante à mes yeux. Triste réalité, je suppose.
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HakyuUn homme que je pouvais considérer comme une deuxième père. Un homme sympa, parfois drôle, selon moi. J'aimais bien aller le voir uniquement pour parler de tout et de rien, sans que ça tourne en mes exploits académiques. Il m'avait appris plein de choses, surtout à cuisiner. Je lui demandais même d'apprendre à coudre parce que j'étais trop curieux d'apprendre. Au début, j'étais le type de personne à rabaisser les esclaves et voir leurs tâches comment quelques choses de bas-étages. Cet homme m'avait appris de voir différemment.
Je me rappelais toutes les fois qu'il agissait en bouclier. Quand mon père piquait des crises de folies, Hakyu était là. C'était drôle de penser qu'un homme qui ne partageait pas le même sang que moi pouvait agir ainsi. Je me disais souvent que c'était son rôle et qu'il le faisait par obligation. D'un autre côté, je me disais qu'il le faisait parce qu'il nous appréciait, malgré tout.
Et je garderais toujours les souvenirs de toutes les fois où quand je faisais des cauchemars et que j'avais peur d'aller dans ma chambre. Il restait avec moi sans hésiter. Il m'apprenait à combattre les monstres qui me hantaient, il me faisait rire...
Des choses que mon vrai père ne voulait pas faire. Nagato préférait m'apprendre la dure réalité tandis qu'Hakyu m'apprenait à rire même si tout allait mal.
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Mori Ineko.Dès que je l'ai vu, je ne pouvais regarder ailleurs. Elle semblait si simple, si douce...une fleur parmi ses mauvaises herbes. Je la regardais dans l'ombre, comme un prédateur qui observait sa proie. Si petite, si jeune et si innocente, elle éveillait en moi un étrange sentiment. Elle était différente des autres personnes que je fréquentais. Elle semblait être une perle en voie de le devenir. Je la regardais rire, agir, vivre. Chaque geste m'enivrait, m'hypnotisait. Elle semblait être une petite déesse, offerte à mes yeux uniquement.
Est-ce que je ressentais du désir ? Je n'en savais rien. Je ne pouvais pas comprendre ce qui me poussait à la regarder. Dès qu'elle souriait, mon coeur devenait attendri. Pour un homme comme moi, qui ne vivait que dans la noirceur de sa propre ombre, elle semblait être un soleil. Elle m'aveuglait.
Cette femme serait-elle pour moi ? J'ai vécu mes années passées dans une solitude particulière, à toujours vouloir plaire, à toujours être le meilleur et me donner à 300 %. J'ai vécu dans un monde où je devais être parfait en utilisant mon instinct, mon intellect et ma force. Je ne devais jamais montrer mes faiblesses, quitte à devenir le plus ignoble des hommes. Par de très rares occasions, je m'attachais à des êtres vivants. Je suis quelqu'un qui est plutôt froid, distant et taciturne. Et là, cette jeune fille, est-ce que je voulais me trouver une porte de sortie ? Je voulais qu'elle me donne ce rayon qu'elle possédait ? Je désirais expérimenter un autre type de vie, sans avoir affaire avec ma famille. Je sentais le besoin de ce détachement. J'étais curieux à l'idée de vivre par moi-même et de voir si je pouvais continuer malgré tout. Quelque chose me disait que je ne devais pas la laisser filer, sinon j'allais le regretter.
Je m'étais surpris à la suivre pendant plusieurs jours. Je laissais de côté mes études, voulant comprendre pourquoi elle m'obsédait autant.
J'avais demandé à ma mère si je pouvais me marier avec cette jeune fille. Je l'avais convaincu, même si elle trouvait mon choix pas pratique pour notre famille. Je lui avais dit que j'aimerais faire quelque chose de différent pour moi, pour une fois. Elle n'était pas sûre de ma vraie raison. En fait, je crois qu'elle savait que mon choix était peut-être basé sur une raison illogique. Moi, je pensais autrement. J'avais même songer à changer de nom de famille pour ne pas créer des rumeurs. Tout seras fais en secret.
Un mariage...était-ce réellement ce que je voulais ? M'acquérir d'une jeune femme que je croyais qu'elle était ma porte de sortie ?
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Ma femme. Je n'arrivais pas à lui donner ce qu'elle voulait. En fait, je n'arrivais pas à m'attacher à cette jeune fille. Je me disais que l'amour était inexistant, qu'il est uniquement une illusion pour les gens trop naïfs. J'essayais quand même de m'approcher d'elle, de lui apporter une certaine présence, mais à chaque fois je m'approchais d'elle, je ressentais un vide. Ensuite, je me sentais énervé. Je ne comprenais jamais mes craintes à m'ouvrir à elle, comme si je ne sentais pas l'obligation de lui dire.
Je n'étais pas satisfait.
Je ne ressentais pas de l'amour, ni de la haine.
Je ressentais le dégoût.
Et pourtant, cette jeune fille m'attirait, non ? Je sentais cette distance entre moi et elle, comme si je n'avais pas le droit de posséder ce soleil. Est-ce que c'était le fais que je le haïssais, qui me rendait dégouté d'elle ? La cicatrice qui orne mon visage en était la preuve que j'avais été marqué par le feu. Une erreur de jeunesse qui me ronge encore. J'avais bien beau de me dire que le soleil était quelque chose de positif, mais je crois que je ne pensais pas la même chose que la plupart des gens. Je mentais à moi-même à chaque fois.
Ma femme. Je n'osais jamais lui dire de ma seconde vie. Trafic de drogue, expérimentations, recherches....pourquoi lui dire ce que je n'avais pas envie de lui dire ? Ce n'était pas de ses affaires. Tout ce qu'elle devait savoir c'était que j'étais un médecin renommé et très bon chimiste. Elle savait aussi mes expérimentations sur l'hypnose. Rien de plus. Je ne pouvais pas lui dire d'autres.
Je me retrouvais souvent à voir ma femme plus qu'un accessoire qu'autre chose. Comme si elle était uniquement là pour faire belle parure. J'étais un homme qui ne voyait que son propre égocentrisme dans son champ de vision. Je pensais uniquement à moi. Avec elle, c'était pire.
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Ma passion. J'étais prêt à faire l'impossible pour arriver à mes fins. Mon père m'avait appris à ne jamais douter de soi-même quand nous aimons quelque chose à la folie. Moi ? J'adorais découvrir des choses, voir des résultats, me noyer dans ce qui me passionnait. Depuis des années, je me lançais dans la médecine et la science. J'avais comme ambition de trouver des méthodes médicinales qui pourraient révolutionner le monde. Certes, j'ai peut-être tombé vers un chemin plus sombre et moins honorables. Au moins, tout ceci partait d'une bonne intention, non ? Qui a dit que toutes les bonnes recherches sont basées sur les bonnes histoires ? Pour moi, je me foutais de faire des expériences sur des esclaves que personnes voulaient acheter. C'était un moyen facile, moins compliqué, que de prendre des gens ''normaux''. Si je devais sacrifier une partie de la population pour en sauver des milliers plus tard, pourquoi hésiter ?
La médecine générale avait été pour moi mon premier intérêt. Depuis tout petit, j'avais ce penchant pour apprendre à soigner les gens et les aider. Je lisais beaucoup de livres à l'époque et ceux qui comportaient sur différents types de médecines m'étaient les plus intéressants. Cet intérêt était devenu par la suite une passion pour en finir à un désir de devenir docteur. J'avais même pris le temps d'étudier les plantes pour ajouter un bonus à tout ça.
Mon second intérêt fut les sciences. Cela ressemblait énormément à la médecine, mais d'une autre perspective moins bio.
Et le dernier, était l'hypnose. Par contre, celui-là, était beaucoup plus relié à ma propre croissance personnelle. Dès que j'ai découvert mon pouvoir vers mes 22 ans, je n'avais pas hésité de le développer. J'avais essayé de me documenter, d'amasser le plus d'informations possible jusqu'à ce que je commence à l'exercer. Ma femme en a beaucoup payé le prix.
Avais-je des remords ? Non. Pour moi, tout était pour la science et la médecine. Même l'hypnose.
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Une erreur de ma part ?Une faille. Avais-je réellement laissé un poisson passé entre mes filets ? C'est sûr que le trafic de drogue est un monde avec des risques, mais moi...faire une erreur ? Des rumeurs couraient qu'il y avait des traîtres parmi nous, que quelqu'un voulait que mes recherches arrêtent. La colère ne pouvait que me rendre fou. Je ne pouvais pas la contrôler ni même la calmer.
Il fallait que je fuie et que je change de location. Il fallait que je pense à emmener ma femme avec moi. Il fallait que je déménage mon bureau, mon labo...tout. J'avais demandé à des connaissances pour venir m'aider tellement que j'étais en état de panique.
Est-ce que j'allais demander à mes parents ? Non. Ils ne savaient rien. En fait, je gardais tout secret.
En quelques jours, j'avais réussi à cacher ma drogue, mes notes de recherches, mes preuves de mes activités dans un endroit clos. À la dernière nuit, là où j'avais décidé de déménager et d'emmener ma femme, je pensais avoir oublié quelque chose à un de mes bureaux. Je m'étais rendu sur place, regardant le moindre recoin. Et non, rien. Je n'avais rien oublié.
Après m'être assuré que tout était dans l'ordre, j'avais sorti de la pièce. Je me disais sans cesse que tout se passerait bien. Mais, la vie m'avait joué un sale tour. La force de l'ordre était là.
La peur. Je ne sais pas pourquoi, mais la peur m'avait trahi. À la place d'agir en homme qui n'avait rien à caché, j'avais fui. J'avais couru, le plus vite que je pouvais, et ensuite tout noir. Plus rien.
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Quand je ne vous dis plus rien, ce n'est plus rien. Je me suis toujours dit que ses rêves ne sont que le fruit de mon imagination. Moi, je marche par fait et non par illusions. Les gens ont bien beau dire ce qu'ils veulent...ils peuvent me mentir pour cacher une vérité.
Mon premier vrai souvenir fut un plafond. Ensuite, des visages qui prétendaient être ma famille, des médecins, des infirmières. Un souvenir réel qui n'était pas dans ma tête.
Je ne comprenais plus rien. On dirait que je m'étais réveillé dans un monde que moi-même que je ne comprenais pas. Je n'arrivais pas à parler ni même bouger. Tout ce que je ressentais c'était une douleur constante à la tête. Cette douleur était lourde, énervante, pesante. Pour le reste, j'étais aussi actif qu'une planche de bois. Je me demandais sans cesse ce qui s'était passé ? Pourquoi j'étais là ? Qui je suis ? Des questions que personnes arrivaient à entendre. Tout se passait dans ma tête.
Les minutes devenaient des heures et les heures devenaient des jours. On dirait que je m'étais réveillé dans un monde que moi-même que je ne comprenais pas. Même que j'arrivais pas à comprendre qui j'étais. La seule chose que je comprenais fut '' Je suis Seisan Kakon'', rien de plus. Ensuite, on m'accusait de plusieurs crimes que j'avais commis. Je ne pouvais rien rétorquer, parce que je ne comprenais rien. Selon moi, je n'avais rien fait. Comment je peux commenter quelque chose tandis que j'ai aucun souvenir ? Pour ''alléger'' ma sentence, on m'avait donné un titre d'esclave. On m'avait confié à une femme dénommée Tenkei Kakon.
Je n'avais pas le choix d'accepter. En fait, je ne pouvais rien dire. Je n'arrivais pas à me défendre avec des choses que je ne comprenais pas.
3 ans se sont passé depuis. J'ai retrouvé quelques brins de mémoires, rien qui a rapport avec mes crimes. Je me rappelle aussi d'une grande partie de mes connaissances en médecine et en plante. Tenkei a dû, bien sûr, à me réapprendre certaines choses en me confiant à quelques personnes. Au moins j'ai appris très vite et même que parfois, juste à comprendre les sujets, ça débloquait quelques talents que je possédais avant ma perte de mémoire. C'est comme la nage, une fois que tu le sais, ça ne se perd pas.
Aujourd'hui, c'est sûr que mon passé me tourmente. Je veux comprendre....pourquoi suis-je rendu une âme trouée d'incompréhensions ? Cela m'effraie un peu de découvrir ce qui se cacherait derrière ce voile. On dirait que je veux l'enlever, mais qu'en même temps, je ne veux pas. Je suis quand même heureux avec ma vie présente, non ? Je suis reconnaissant envers Tenkei qui a pris soin de moi, même quand j'étais le plus pire des planches de bois. Est-ce que je veux réellement détruire le petit bonheur que je me suis construit ? Servir Tenkei est ma priorité. Si je recouvre ma mémoire, j'ai peur de perdre ce que j'ai bâti en ses 3 ans...